Itinérance à Montréal : police, Ville et CIUSSS patrouillent « enfin … – Radio-Canada.ca

Ça peut paraître évident, mais c’est du jamais-vu à Montréal : des policiers patrouillent dans les rues en compagnie d’intervenants psychosociaux de la Ville et du réseau de la santé à la rencontre des itinérants. L’initiative, mise en place le mois dernier, est une réponse aux problèmes de cohabitation soulevés depuis le début de l’été dans le centre-ville. Radio-Canada les a accompagnés une matinée.
Les policiers de l’Équipe de concertation communautaire et de rapprochement (ECCR) prennent le temps de discuter avec un itinérant.
Photo : Radio-Canada / Thomas Gerbet
Sur un banc du parc Charles-S.-Campbell, à deux coins du métro Papineau, un couple fume du crack . « Ce n’est pas très subtil », leur dit le sergent Laurent Gingras, en arrivant par-derrière.
— « On ne le fera plus. »
— « C’est un parc où il y a des enfants. Faites ça chez vous. »
— « On n’a pas de logement… »
Chaque jour, les policiers de Montréal sont confrontés à l’itinérance et à la toxicomanie, mais ils ne savent pas toujours comment s’y prendre.
Aujourd’hui, la majorité des appels que reçoivent les patrouilleurs sont des problématiques de nature sociale, pour lesquelles le policier n’est pas nécessairement outillé
, reconnaît le sergent Gingras.
La nouveauté, c’est que depuis le mois de juillet, il y a dorénavant à ses côtés des intervenants spécialisés qui peuvent prendre le relais.

Kim Choinière-Tran (de dos) accompagne des policières en discussion avec une itinérante qui consomme de l’alcool rue Sainte-Catherine.
Photo : Radio-Canada / Thomas Gerbet
« Laissez-moi tranquille. » Une itinérante en train de boire de l’alcool perd patience devant l’approche de deux policières. « Vous avez besoin d’aide? » demande un homme en chemisette, short et casquette.
Il s’agit de Kim Choinière-Tran, de l’équipe Urgence psychosociale-justice (Nouvelle fenêtre) du CIUSSS Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, l’un de ces nouveaux accompagnateurs du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).
J’ai beaucoup de personnel à ma disposition, des équipes en dépendance ou santé mentale que je peux consulter
, explique-t-il.
Auparavant, il était appelé par les policiers à l’occasion pour évaluer la dangerosité d’une personne à l’état mental perturbé, ce qui impliquait un délai avant d’arriver sur place. Maintenant, il patrouille à pied avec le SPVM quatre jours par semaine.

Maëlle Delourmel et un autre intervenant psychosocial de la Ville de Montréal accompagnent l’agent Philippe Desautels-Garant, dans le Village.
Photo : Radio-Canada / Thomas Gerbet
Maëlle Delourmel, de l’Équipe mobile de médiation et d’intervention sociale (Nouvelle fenêtre) (EMMIS) de la Ville de Montréal, marche aussi aux côtés des policiers. Avec cette nouvelle collaboration, tout le monde y gagne
, selon elle.
L’intervenante psychosociale prend le temps d’échanger quelques conseils avec la policière Maude Despaties au sujet de la communication avec les itinérants : J’ai pris cinq minutes de mon temps à entendre des histoires de folies, parce qu’ils n’avaient pas toute leur tête, mais en même temps, ça a créé un lien.
Ça nous fait voir une façon différente de travailler, une autre mentalité par rapport aux choses de la rue. Alors que nous, on peut avoir une vision plus répressive, parce que c’est ça qu’on a appris à l’école. Ça nous permet d’avoir le contact beaucoup plus facile avec les gens.

L’agente Maude Despatie discute avec une itinérante, rue Sainte-Catherine.
Photo : Radio-Canada / Thomas Gerbet
Sur la rue Sainte-Catherine, un homme sensibilise les policiers à sa réalité : $ [de loyer par mois]. L’autre est parti, je n’étais pas capable de payer. Je me suis retrouvé dans la rue.”,”text”:”On était deux dans un logement de 950$ [de loyer par mois]. L’autre est parti, je n’étais pas capable de payer. Je me suis retrouvé dans la rue.”}}”>On était deux dans un logement de 950 $ [de loyer par mois]. L’autre est parti, je n’étais pas capable de payer. Je me suis retrouvé dans la rue.
Maintenant, les policiers reconnaissent des itinérants et les appellent par leur prénom.
C’est super beau à voir
, dit le commandant Alexandre Lelièvre, dans une salle de réunion du poste de quartier 21, rue Berri. Il est fier de dire que c’est le SPVM qui a pris l’initiative de se rapprocher de la Ville et du réseau de la santé. Enfin!

Autour de la table de la réunion du matin, au poste de quartier 21, on retrouve des représentants de la Ville de Montréal et du CIUSSS Centre-Sud.
Photo : Radio-Canada / Thomas Gerbet
Les reportages sur le sentiment d’insécurité liés à l’ampleur de l’itinérance et la toxicomanie dans le Village, dans le Quartier des spectacles ou près du Palais des congrès ont montré que des acteurs comme la Ville de Montréal ou le ministère de la Santé se renvoyaient la balle.
Avant ça, personne ne se voyait et ne se parlait sur le terrain. Chacun faisait des actions isolées, pas concertées. On n’était pas efficace.
Ce qu’on constatait depuis le mois d’avril, c’est que la police était énormément présente sur le terrain. Par contre, les autres institutions, le réseau de la santé et la Ville, étaient plus effacés
, raconte le commandant Lelièvre. : on va le travailler, on va coordonner cette stratégie-là qui implique énormément de monde.”,”text”:”On s’est dit: on va le travailler, on va coordonner cette stratégie-là qui implique énormément de monde.”}}”>On s’est dit : on va le travailler, on va coordonner cette stratégie-là qui implique énormément de monde.
Le commandant affirme qu’il y a une nette amélioration
sur la rue Sainte-Catherine et dans le centre-ville de Montréal depuis les cinq dernières semaines que la patrouille commune est lancée.

Une pipe à crack qui permet de fumer de la cocaïne sous forme de cristaux.
Photo : CBC/Lauren Pelley
Assis devant une vitrine commerciale du Village, deux hommes se dépêchent de ranger des affaires dans un sac. Tu as vu les pipes à crack?
nous demande l’agent Philippe Desautels-Garant, du SPVM.
Personne n’est arrêté. C’est un problème de santé
, dit le policier. Est-ce qu’en les judiciarisant, ça va régler leur problème?
Il y a des organismes communautaires qui vont distribuer du matériel stérile de consommation. Nous, on est qui pour passer derrière et le prendre?
Au parc Charles-S.-Campbell, une mère de famille interpelle la patrouille. Elle dénonce un homme qui s’est lavé pendant 15 minutes dans la fontaine, avec shampoing et savon.
Les policiers trouvent un homme habillé d’un simple boxer, assis sur une table. Le sergent Laurent Gingras l’interpelle : Bonjour. Ça va? T’es correct? Tu as besoin d’aide?