Les témoignages accablants de prisonniers de guerre ukrainiens … – Ouest-France
Le lieutenant Artemi Seredniak, 27 ans, dirigeait une section de tireurs d’élite. En mai 2022, il fut l’un des derniers soldats ukrainiens à se rendre, à l’issue du siège d’Azovstal, ultime épisode de la conquête de Marioupol par l’armée russe. Emmené en Russie durant l’été, il a vécu l’enfer à la maison d’arrêt n° 2 de Taganrog (sud-ouest), par où passaient de nombreux prisonniers de guerre en attente de jugement. Fouille de rigueur deux fois par jour, coups répétés pour qu’il confesse avoir ordonné pillages et meurtres de civils. « Ils tapaient jusqu’à ce qu’ils entendent ce qui les intéressait », dit-il. Un officier aurait « brisé une chaise en morceaux » à force de le frapper.
Iryna Stohnii, une infirmière militaire de 36 ans, reste marquée par les clés aux bras presque jusqu’à la rupture, la « malnutrition constante » et les « menaces de viol ». Denys Haiduk, chirurgien militaire de 29 ans, rapporte « les convulsions » sous les coups de matraque électrique dans les reins ou à l’aine, jusqu’à l’épuisement des batteries. Il a encore été rossé parce qu’il refusait de signer un document certifiant ses blessures accidentelles, juste avant sa libération dans le cadre d’un échange entre l’Ukraine et la Russie.
Seredniak, Stohnii et Haiduk font partie de la douzaine d’ex-prisonniers ukrainiens de Taganrog dont la BBC britannique a diffusé les récits, mercredi 16 août : une interminable liste de violations des conventions de Genève, signées par Moscou. Selon Dmytro Lubinets, médiateur ukrainien qui a négocié l’échange de 2 500 prisonniers de guerre contre des Russes, neuf rescapés sur dix affirment avoir été torturés. L’Ukraine évalue à 10 000 le nombre de ses soldats encore détenus.
Les civils maltraités aussi
Ces récits sont corroborés par des défenseurs des droits humains et d’autres témoignages. En février, un officier russe en fuite au Mexique, Konstantin Yefremov, disait à la chaîne américaine ABC avoir été témoin de torture lors de l’interrogatoire de soldats ukrainiens capturés. Jusqu’à des tirs à balles réelles dans les bras et les jambes.
Les militaires ne sont pas les seuls prisonniers ukrainiens victimes de la Russie. Fin mai, l’Onu rapportait soixante-dix-sept cas de détenus civils arrêtés par l’occupant et sommairement liquidés, et de nombreux cas de civils brutalisés. L’ONG russe Gulagu.net, qui scrute le système carcéral, a recensé 103 centres où sont enfermés des civils ukrainiens en Russie et dans le Donbass occupé. Le mois dernier, elle estimait à plus de 8 000 le nombre d’Ukrainiens qui y sont détenus.